Depuis ses premières distillations de rhum, Vivant a expérimenté des sucres et mélasses de plusieurs origines : Pérou, Colombie et Paraguay, à la recherche d’un partenariat de production satisfaisant, tant du point de vue de la qualité que sur les plans humain et éthique.
Mais ce défi s’avère difficile à relever : le sucre est un produit de très grande consommation, symbole de la mondialisation des échanges, aux mains de très gros opérateurs…
Pour nos distillation 2021-2022 nous nous sommes tournés vers une mélasse bio et équitable venue de Cuba – c’est le produit qui nous semble fournir les meilleures garanties à l’heure actuelle.
Notre mélasse est produite au centre de l’île de Cuba, dans la province de Villa Clara. certifiée bio par ECOCERT et équitable par FLOCERT.
Contrairement aux idées reçues, Cuba est loin de produire exclusivement en agriculture biologique. Celle-ci a en fait surtout été développée pour assurer l’autonomie alimentaire de l’île, avec des projets d’agriculture urbaine et périurbaine qui ont fait leurs preuves et font figure d’exemple dans le monde entier.
Mais l’industrie sucrière cubaine reste encore à convertir. Les prix très attractifs du sucre bio (payé le double du conventionnel) et une demande exponentielle des pays de l’Union européenne des États-Unis et du Japon en font une solution d’avenir pour un secteur en grande difficulté.
Au tournant des années 2000, le Ministère du Sucre cubain donne pour mission à la sucrerie ‘Central Carlos Baliño’ de Villa Clara, qui regroupe différentes coopératives de la région, d’initier et développer la première production de sucre biologique du pays. En lien avec l’université voisine de Las Villas et l’Association des Techniciens du Sucre de Cuba, l’opération vise une reconversion intégrale de la production.
La première étape est la conversion et la préparation des sols : engrais naturels, fumier, compost, engrais verts, humus de vers de terre et autres bio-fertilisants viennent remplacer les engrais chimiques. Les pesticides cèdent la place à des procédés de lutte biologique (pour laquelle il existe à Cuba un institut scientifique national) . De la plantation à la récolte de la canne à sucre les coopératives associées n’utilisent plus désormais que des techniques biologiques, tout en s’appuyant sur la rotation et la diversité des cultures. Une révolution des conceptions et des pratiques à accomplir par les cultivateurs locaux.
En 2000/2001, la première récolte de sucre biologique à Cuba a atteint 4 000 tonnes. La sucrerie Carlos Baliño a aujourd’hui la capacité de produire 10 000 tonnes par an sur quelque 5 000 hectares de canne certifiée biologique. Elle fait l’objet d’audits de supervision annuels tout au long du cycle de production. du sillon à la raffinerie.
La sucrerie Carlos Baliño travaille également à titre expérimental sur des projets écologiques de diversification comme la production de fruits et légumes bio déshydratés, unique en son genre au centre du pays.
Également en marge du projet, quatre Unités Coopératives de Production de Base (UBPC), rattachées à la sucrerie Carlos Baliño, assurent une production agricole 100 % biologique destinée à l’autoconsommation des producteurs de sucre et contribuent à l’autonomie alimentaire locale.
Par exemple, l’UCPB Bermejal compte 28 hectares de terrain dédiés à diverses cultures : riz, maïs, potiron, patate douce, yucca, banane et sésame, ainsi que des arbres fruitiers comme le manguier. La production nourrit aussi un troupeau de 250 vaches laitières, des porcs, des lapins, des poules pondeuses et des poulets de chair – précieux apports de protéines animales dans un pays qui en manque cruellement.
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Remarques et questionnements :
Les informations exposées ci-dessus ne sont, hélas, pas de première main. Elles sont une synthèse d’articles émanant de la presse cubaine, de rapports d’ONG, de documents de recherche en sciences sociales.
Il s’avère difficile de comprendre ce que recouvre la certification « commerce équitable » Ecocert dont bénéficient le Central Carlos Baliño et la Société nationale exportatrice du produit.
Comment est évaluée la notion d’équité dans le cadre d’une économie centralisée, non-capitaliste où la monnaie ne donne pas la mesure de toute chose ?
Cuba a certes le revenu nominal par habitant le plus faible d’Amérique du Sud, mais on y naît avec une espérance de vie de 79 ans, niveau équivalent aux pays à revenus élevés de l’OCDE. Le pays bénéficie d’un système de santé très performant et d’un système éducatif qualifié d’exemplaire par l’UNESCO. Au 131ème rang mondial en termes de PIB par habitant (à parité de pouvoir d’achat), Cuba est 51ème sur 182 en termes d’indice de développement humain.
Nous continuons nos investigations et restons à l’affût de toute information.
Nous souhaiterions vivement pouvoir nouer un contact direct avec des représentants du Central Carlos Baliño, des responsables du projet, voire avec des cultivateurs participants. Malgré des démarches répétées, nous n’y sommes hélas pas parvenus à ce jour.